Dandelion. Luc Lapraye
Dandelion, communiqué de presse de l’installation de Luc Lapraye, Parvis de la Mairie du 3e arrondissement, dans le cadre des hors les murs de la YIA Art Fair #07, octobre 2016.
Si l’œuvre Dandelion semble rejouer le ready-made Bicycle Wheel de Marcel Duchamp ou l’installation Forever Bicycles de Ai Weiwei, la demi-sphère en jantes de bicyclettes de Luc Lapraye, non contente de « recycler » l’histoire de l’art, la déploie jusqu’à son éclatement. Tel le « dent de Lion », ce pissenlit dont les capitules s’envolent et sèment au gré du vent, l’œuvre semble animée d’une écologie particulière fondée tant sur un biomimétisme qu’un complexe ingénérial empruntant aux dômes géodésiques ses caractéristiques mathématiques et autoportantes.
Propice à l’imaginaire, la géode, avant d’être un monument architectural, signifie « comme la terre », provenant du grec γη̃ (guê) « terre » et de ει̃δος (eïdos) « forme, aspect », la géode se réfère à la rotondité du globe. Elle évoque sur un plan macroscopique les sphères d’influence ayant façonné nos civilisations, du Cosmos à la Globalisation, des voûtes célestes à la matrice utérine. Elle suscite, sur un plan microscopique, une réflexion multifocale, multi-perspectiviste et non-métaphysique qui, des formes fractales aux divers réseaux et embranchements, en passant par les serres climatiques, trouve le terrain fertile d’une cohabitation des règnes du vivant et du non-vivant. À l’image d’un parapluie symbolique où se projette le ciel de nos fantasmes, elle semble abriter un monde miniature, dont les lois anthropotechniques conditionnent une biosphère autonome. Inspiré de formes et de fonction relevant du vivant, la géode se rapproche d’une intelligence de la vie. Artefact de la modernité, elle n’en est pas moins un médiateur rêvé du langage de la nature ; elle relie, en des boucles de plus en plus serrées, la science et l’imaginaire, la nature et la culture, l’homme, son environnement et la vie non humaine.
Dandelion se présente alors comme l’allégorie d’une écologie contemporaine qui emprunte à la théorie des Sphères de Peter Sloterdijk, ses caractéristiques « cosmopolitiques » et « biosophiques». Atmosphère métaphysique et atmosphère physique, elle pose les conditions biologiques d’un agir technique qui se veut tout autant politique, et rappelle que l’avenir demeure un enjeu écologique, où le recyclage offre toujours une vie à ce qui n’en avait plus.