Hugo L’Ahelec. The Death Show
Hugo L’Ahelec, texte de présentation Prix Révélations Emerige, Out Side Our, Villa Emerige, 2018, commissariat Gaël Charbau assisté de Aurélie Faure.
La modernité avait érigé sa science et sa technique en vérités universelles, elle avait tant rationalisé qui lui semblait avoir repoussé ses croyances et ses rites obscurs dans les arcanes de l’oubli. En troquant ses arrières-mondes et ses archaïsmes au profit d’un monde de doublures, de flux de marchandises ou d’images, elle était passée de la valeur cultuelle à la valeur culturelle, faisant du spectacle, l’envers d’une ratio désormais d’autant plus féroce que féérique. S’insinuant par les pores du Capital, elle cristallisa en cela une ronde fantasmagorique autrement plus subtile où, ce qui fut sacré se trouvait sans cesse reconfiguré.
Dans le monde réellement renversé, le vrai était devenu un moment du faux. Et c’est au sein de cette transvaluation, conduisant la modernité aux vestiges de tous ses post-, que Hugo L’Alhelec tente de « trouver les moyens de symboliser la transcendance et de négocier avec elle, comme on négociait avec les divinités et les mythes ». Ses derniers projets réunis sous l’appellation The Death Show mettent en scène la manière dont nos croyances ont migré du culte au display, du religieux au divertissement, de la consumation à la consommation. Drapée d’un voile de pudeur, la mort en Occident a évacué le rite et les grandes pompes, préférant la solitude du mourant à la libération des pulsions. Aussi, plutôt que d’alimenter son tabou, Hugo L’Ahelec réhabilite son refoulé, sans volonté de moralisation ni de fonction cathartique. Le vocabulaire du spectacle pénètre à nouveau la sphère du funéraire et aménage un rituel artificiel, susceptible de nous reconnecter au transcendant, par la symbolique et le jeu. Ainsi, explique-t-il, chaque étape peut être rejouée dans le langage profané du spectacle : la veillée est mise en parallèle de la loge ou des coulisses qui préparent à la métamorphose. La procession est substituée à la performance, faisant du visiteur à la fois un spectateur, un acteur, un participant ou un figurant. Le rideau y devient enfin une synecdoque, une référence au décor de cinéma ou de théâtre. Si la dramaturgie emprunte au règne du factice et du fictionnel, ce sera donc pour mieux en incarner l’action liturgique.